Autour de la profession de foi des adolescents
 
 

L'Eglise en Alsace n° 5 - Mai 1978

Tout le monde est d'accord pour affirmer que la « Profession de foi des adolescents » est un problème difficile.

Depuis plusieurs années, des recherches sont faites, qui sont souvent plus des tâtonnements que des projets précis et satisfaisants On peut avoir l'impression de tourner en rond.

Certains curés, aumôniers et catéchistes voudraient un âge plus avancé (15 ou 16, et même 18 ans), quelques-uns proposent 12 ans, d'autres préfèrent lier profession de foi et confirmation ; beaucoup de prêtres continuent comme dans le passé et se trouvent chaque fois plus déçus aux lendemains de la fête. Quelques-uns cependant pensent avoir fait un pas en avant. Il faut mentionner enfin ceux qui ont opté pour une solution radicale, en supprimant la profession de foi.

Nous voudrions nous placer du côté des pasteurs qui portent le souci de soutenir et d accompagner les jeunes en cette période de leur évolution il ne s’agit pas de défendre envers et contre tout un pouvoir à exercer sur les jeunes, ni de donner l'impression rassurante qu'on les a bien en en mains La situation actuelle est sérieuse ; elle exige de nous beaucoup de lucidité et une grande humilité. Peut-on faire autre chose que de voir ce qui est possible, sans idées préconçues ni plans bien arrêtés ? Si nous pouvons assurer aux jeunes un maximum de chances pour qu'ils découvrent dans l'Église un milieu qui les aide à vivre, à réfléchir sur le sens de leur existence, à progresser vers une foi personnelle à développer leurs capacités propres au service des autres, nous aurons déjà fait beaucoup. N’oublions pas que le monde dans lequel nous vivons — et donc aussi les jeunes — ne cesse de prendre ses distances par rapport aux valeurs nées de l'Évangile et portées par de nombreuses générations, ce qui demande aux chrétiens, aujourd'hui plus qu'hier du courage et une grande persévérance.

C'est pourquoi, il nous semble bon de relever ici quelques points importants qui seraient à prendre en considération, quelles que soient les expériences tentées et les réalités rencontrées. Au-delà de tous les ratés et malgré eux, n'y a-t-il pas des constances qui représentent un acquis positif pour la pastorale ?

Et tout d'abord, ajustons notre vocabulaire. Nous préférons parler de « Profession de foi des adolescents ». Nous voulons dire par là que la profession de foi n'est pas unique, faite une fois pour toutes : elle fait partie d'un ensemble, elle aura une suite. Ne parlons plus de « Rénovation des vœux de baptême », expression fausse, qui risque de figer le baptême dans le passé, ni de « Communion solennelle », terme qui malheureusement suggère la fin de toute formation religieuse.

Dans cette optique, nous affirmons que la profession de foi est :

1) une chance pour développer la foi personnelle : même si certains adolescents donnent l'impression de « subir » une structure imposée par des adultes, même si certains ne montrent aucun intérêt pour la foi, ayant perdu tout contact avec la communauté chrétienne depuis la première communion ou la confirmation, d'autres vivent sérieusement le temps de préparation à la profession de foi. Qui dira ce qui se passe dans les profondeurs de la conscience ? Ne pas proposer aux jeunes à 13-14 ans, des lieux de rencontre, de formation et d'engagement pour tous, entraînera rapidement leur éloignement de l'Église. Au contraire, lorsqu'on respecte la sensibilité des jeunes d'aujourd'hui et les formes d'expression qui .leur sont familières, lorsqu'on leur permet de vivre une expérience religieuse au sein de petits groupes, lorsque la formation ne reste pas simplement théorique mais tient compte de la réalité de tous les jours, la profession de foi devient un temps fort dans une évolution humaine et chrétienne. Les jeunes peuvent alors se découvrir sous le regard de Dieu, dire oui à l'Évangile du Christ et en faire leur règle de vie. En un moment où l'adolescent conteste ce que le monde des adultes lui apporte, il est bon qu'il ait une large possibilité de réfléchir avec d'autres jeunes et de vérifier dans le concret de la vie la foi qu'on lui enseigne. Il peut ainsi commencer (et poursuivre) un cheminement très personnel vers le Christ et avec les autres, cheminement qu'on ne présentera jamais comme aboutissant uniquement à la fête. La profession de foi des adolescents est une profession de foi parmi d'autres, importante en vue des étapes suivantes.

2) une occasion pour rencontrer les parents : il ne s'agit pas de profiter d'un événement concernant d'abord les jeunes pour exercer une pression sur les parents. Tous les prêtres conviennent que le temps de préparation à la profession de foi des adolescents constitue un moment favorable où les parents montrent de l'intérêt pour une formation, voire une remise en question de leur foi. Il arrive que des parents soient amenés à une véritable conversion, simplement par le fait qu'ils suivent leurs jeunes et qu'ils donnent plus de places dans leur foyer à la prière, à la réflexion, aux échanges sur la foi.

Le grâce de Dieu passe aussi dans ce cadre, et il faut s'en réjouir. Encore faudrait-il voir ce qu'il est possible de faire dans ces réunions. Beaucoup de parents (et nous aussi) sont démunis devant les jeunes, ne parviennent pas à entrer dans le monde nouveau de la science et de la technique dans lequel les jeunes vivent déjà de plain-pied. La réflexion entre adultes responsables, le partage des expériences est nécessairement bénéfique aux uns et aux autres.

3) une exigence qui concerne l'ensemble de la communauté chrétienne : la profession de foi, en ses diverses formes, n'est jamais une simple affaire personnelle, elle intéresse toute la communauté. Parallèlement aux efforts faits avec les jeunes et les parents, nous devrions éveiller l'attention de la communauté. Si elle n'accueille pas les jeunes, si elle ne se renouvelle pas, si elle ne fait pas place aux nouvelles générations de croyants, elle perd de sa vitalité, elle se coupe pour ainsi dire de l'avenir. Il lui revient de rendre possible la profession de foi : c'est en elle que les jeunes doivent se sentir stimulés et encouragés ; c'est en elle qu'ils peuvent être reconnus comme fils de Dieu, frères en Jésus Christ, solidaires de tous les hommes qui vivent selon l'esprit de l'Évangile. Lorsque les jeunes sont à l'aise dans la communauté, lorsqu'ils peuvent tisser des relations de confiance avec le prêtre et les laïcs responsables, un grand pas est fait. Ceci permet aux jeunes d'accéder à une foi adulte et responsable.

4) un temps fort de la vie du jeune en famille : des sociologues et des théologiens ont montré récemment l'importance de la fête dans la vie des hommes. La foi a besoin de fêtes, de rythmes, de saisons pour s'exprimer, s'incarner et s'approfondir. Pourquoi la famille ne se réunirait-elle pas à l'occasion d'une fête religieuse ? Il est normal que le prêtre (et la communauté chrétienne) réagisse contre des excès éventuels, mais les gens ont tellement de difficultés à se réunir, à se comprendre et à s'aimer, que l'Église se doit de soutenir tout ce qui crée des liens entre les hommes. La profession de foi donne un contenu chrétien à un moment où le jeune veut s'affirmer et faire reconnaître sa personnalité.

En affirmant les chances que représente la profession de foi, nous ne nions pas ses limites. Nous ne voulons pas imposer des vues qui iraient à rencontre de la liberté de l'acte de foi des chrétiens. Notre pastorale doit permettre à chaque jeune d'atteindre sa maturité et de répondre à sa manière et en son temps aux appels du Christ. A chacun de choisir, mais en tenant compte des propositions concrètes et précises que les responsables du diocèse présenteront.

Commission « Sacrements et Vie »
du Conseil du Presbyterium

 
     
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Assises de la Confirmation - Eglise catholique d'Alsace